Les Minichats, Bruno Gibert, éditions Albin Michel Jeunesse, EAN 9782226231017, 13,90 €
Pour les uns, Bruno Gibert est le plus graphique des illustrateurs. Pour d’autres, il est un authentique artisan du verbe qui sait si bien faire jouer les mots. Et certains ne jurent que par ses albums sans texte. Mais, sans aucun doute, chacun se réunira autour de sa dernière livraison aux éditions Albin Michel Jeunesse. Car Les Minichats conjuguent avec virtuosité les talents d’illustrateur, de graphiste et d’auteur de Bruno Gibert.
Alors voici quatre mini-livres dans un coffret, aussi admirablement façonnés que dans une mini-bibliothèque de Maurice Sendak : couverture texturée, jaquette et beau papier. Tout ça pour qui, pour quoi ? Pour quatre mini garnements qui enchaînent bêtises et absurdités. Le décalage entre la sophistication du contenant et la trivialité du contenu fait mouche et renforce l’irrésistible humour qui naît de ces petites histoires minimalistes bien facétieuses.
Le texte est rimé mais pas systématiquement, répétitif mais à dessein, rythmé avec élégance, et surtout, d’une fine drôlerie. Quant aux images, Bruno Gibert réussi l’exceptionnel tour de force de les rendre résolument modernes tout en étant très référencées. Les années 30 sont là, on croirait même voir ici ou là l’une des formes au pochoir en couleur soufflée d’une Nathalie Parain. Les années 50 aussi semblent convoquées, dans certains motifs ornementaux, notamment. Pourtant, c’est bien un graphisme du XXIe siècle qui nimbe cette création, avec sa gamme chromatique resserrée autour de quelques couleurs d’une densité rare, ses points de vues audacieux, sa grande économie de moyens…
Bruno Gibert, Les Minichats © éditions Albin Michel Jeunesse, 2011
Jouant ainsi de tous les décalages (de contenu, de ton, de références), l’ensemble, avec son unité de couleurs, sa matérialité, son attention au moindre détail, et, surtout la très forte singularité de son univers fictif et esthétique, affiche pourtant une très grande cohérence.
Les Minichats, c’est un artiste sophistiqué qui se penche sur du petit, du tendre, du drôle, de l’anecdotique. Et, en cela, c’est bouleversant. L’une des très grandes réussites de cet automne.
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A voir aussi chez Albin Michel Jeunesse en cet automne :
Le Roi des Oiseaux, Gwendal Le Bec (ça ne s’invente pas !), octobre 2011, EAN 978222622080, 14,90 € Un très beau travail de dessinateur, vraiment remarquable, dont le grand format et la bichromie noir/orange renforcent le caractère impressionnant, pour une narration courte, efficace, très forte, aux allures de conte étiologique.
Les Boutiques d’Angélique, Alice Melvin, Éditions Albin Michel-Jeunesse, octobre 2011, EAN 9782226220356, 15 € Un album aux illustrations réjouissantes par leurs innombrables détails et leur grande tenue graphique. On explore ces boutiques dont l’intérieur, sous la devanture, est présenté sous un rabat, avec gourmandise, au sein d’un univers très « maison de poupée ».
Commentaires
ooohhh, je n'ai pas encore sorti les petits livres de ce coffret mais je vais réparer ça cette semaine!
GaëlleBruno Gibert sera en dédicace le 26 novembre au Merle Moqueur
SVdLil est sur la liste du père noël celui-là !
ktlBonjour Sophie,
Truculents !
C'est vraiment le mot qui m'est venu à l'esprit après avoir découvert les histoires impertinentes de ces Minichats. Et d'une vivacité ! Excellent.
Ce genre de petits plaisirs nous fait devenir chercheur d'or et nous fait connaitre la fièvre de l'exploration dans les librairies. Fouiner, farfouiller, remuer, explorer les rayonnages. Dé-ranger, dé-couvrir, dé-placer les albums et autres merveilles. Et enfin - oh joie (de lire...)! - tomber sur cette précieuse boîte coincée entre deux livres-rochers fades et indigestes tel une pépite miraculeuse perdue dans un tamis entre des cailloux sans éclats. Quel bonheur !
Tout comme vous, j'ai été très attiré par le style de Gwendal Le Bec dans l'album "Le Roi des Oiseaux". J'ai été très sensible au trait fragile représentant les oiseaux. Cela m'a fait pensé au livre "Les Oiseaux" d'Albertine et de Germano Zullo. Tous deux dégage quelque chose de très poétiques.
Quant à l'album d'Alice Melvin, j'avoue être resté sur ma faim... J'ai dévoré les boutiques les unes après les autres. Mais trop rapidement à mon goût. Peut-être trop gourmand et pas assez gourmet... Chacune des boutiques est minutieusement dessinée. Très bel ouvrage en effet mais...
PS: J'ai récemment pu lire la lettre ouverte de Martine Bourre sur le site de La Citrouille et l'article d'Etienne Delessert sur la (dé)considération du prix Caldecott. Epiphénomènes ? Ou réelles dérives ?
PS: Il faut vraiment que je découvre la librairie Le Merle Moqueur...
Bonne journée.
David Gal-RegniezBonsoir Sophie,
Confirmation que vos choix sont partagés par la communauté...
Pépite de l’album 2011 :
Le Roi des oiseaux, Gwendal Le Bec, Albin Michel Jeunesse
Au dernier tour du jury, était présent :
Une chanson d’ours, Benjamin Chaud, Hélium
Bonne soirée !
David Gal-RegniezIls sont adorables ces minichats. Merci pour la découverte!
Morisoph