9782812611360.jpg Loïc Froissart, Ma Cabane, Rouergue, 2016, 13€


À première lecture, il s'agit d'une ode à la vie en pleine nature, un Walden simplifié et revisité par un graphisme audacieux, atypique et envoûtant par ses formes sinueuses et ses couleurs franches. Un randonneur parvient dans une cabane située en pleine forêt, en éprouve tous les plaisirs, puis repart en rendant enfin sa tranquillité à un ours voisin.

dp07.jpg © Rouergue, 2016, site de Loïc Froissart

À deuxième lecture, on se croit en présence d'un album "presque sans texte", de ceux dont on aurait ajouté un texte a minima pour rassurer les médiateurs. Mais chez cet éditeur, cela semble peu probable. On entame alors une troisième lecture et on s'aperçoit que le texte joue bien son rôle d'ancrage jadis décrit par Roland Barthes : il fixe l'attention sur le randonneur qui célèbre les joies de la nature pendant que l'ours peut dès lors être identifié comme un personnage secondaire, mimant et toisant l'humain, en un chassé-croisé réjouissant. Après toutes ces relectures, on remarque enfin ce livre abandonné en première page, puis repris par l'ours en dernière...

On revient alors au livre avec une quatrième lecture. Dernière hypothèse : le texte peut tout aussi bien être attribué à l'ours, narrateur qui évoquerait sa vie quotidienne dans sa cabane, qu'un personnage secondaire inopportun (le randonneur) viendrait troubler le temps d'un week-end en forêt.

Dès lors, on considère que Ma Cabane est assurément un album à retenir, aussi bien pour son message subtil de célébration de la nature, pour son esthétique singulière que pour le joli pas-de-deux qu'il noue avec son lecteur.