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Michel Galvin, Rouge, Rouergue, 2016

Un caillou roule. Oui, like a rolling stone. Comme échappé, non pas d'un album de musique, mais d'un album pour enfants du même auteur, Michel Galvin, un livre publié en 2008 au Seuil, Jean-Luc et le caillou bleu, dont nombreux sont ceux qui regrettent l'arrêt de commercialisation, tant ce livre réussissait une synthèse originale du théâtre classique et de la comptine pour enfants, avec force rimes et jeux d’images, un livre à lire et à relire avec un bonheur partagé entre adultes et enfants.

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1ère de couverture de Jean-Luc et le caillou bleu / ouverture de Rouge

Rallier petits et grands autour d'albums de création à la portée philosophique est précisément l'une des qualités de Michel Galvin illustrateur pour la jeunesse. Ici, il élargit encore le spectre avec un album dit "de naissance", dans le cadre du projet développé depuis 27 ans par le Conseil Général du Val de Marne, qui, non content d'offrir chaque année un livre à tous les nouveaux-nés du département, soutient dans le même temps la création d'un ouvrage d'exception. Le dispositif a largement essaimé en France, notamment dans le cadre de Premières Pages. De fait, les albums de naissance abondent désormais. Et c'est peu dire que celui-ci déjoue toutes les attentes. Au lyrisme, à la poésie, voire au flou hamiltonien qui marquent le plus souvent cette production, Michel Galvin oppose un fond rugueux, des cailloux et des bâtons. Nothing else. Si, bien sûr : un jeu. Un jeu de manipulation, d'équilibre, un jeu de formes comme les aiment les jeunes enfants. Un jeu à nommer. Tarabus, Plinette, Jean-Charles, Barabosse... Les noms sont à l'image même du livre : enfantins, créatifs et tendres.

Capture_d_e_cran_2017-03-10_a__14.13.59.jpg © Rouergue 2016

On n'y trouvera aucun récitatif, aucune mise en narration. Un livre est un livre, on y entre comme on l'ouvre. Aucun personnage non plus. Les cailloux et les bâtons s'animent au gré d'un soliloque. Le livre ne représente pas un enfant en train de jouer, il est le terrain d'un jeu animé par la verve et l'imaginaire enfantins, comme dans L'Etroit cavalier (2006) du même auteur, ou bien encore Pierre et le lours, de l'éditeur et ami Olivier Douzou (MeMo, 2009), partie prenante du présent projet. Ensemble, avec radicalité et bienveillance, ils ont fait de ce livre étonnant un authentique et puissant album de naissance, qui s'achève, avec évidence, sur l'interrogation : "Mais comment va-t-on l'appeler ? ".

"Rouge" répond la couverture, seul nom commun du livre, car il s'agit bien, ici, de distinction.