Grégoire Solotareff, Renoir imagier, L’École des loisirs, janvier 2022, 13,50 €
Jouant de l’indécision du terme « imagier », qui désigne un livre d’apprentissage par l’image depuis celui du Père Castor en 1957, mais aussi, depuis le Moyen-Âge, un artiste qui fait des images, ce titre invite à considérer l’imagier d’un imagier, un livre de peintre, donc.
En 1992, avec son compère Alain Le Saux, Grégoire Solotareff lançait déjà un Petit musée qui, le premier, offrait aux très jeunes lecteurs le plaisir d’explorer des détails d’œuvres d’art aucunement créées à leur attention.
© L'école des loisirs, 2022
Depuis, rien n’a infléchi la démarche de Grégoire Solotareff, artiste avant tout, qui placarde depuis toujours des reproductions de peinture sur les murs de son atelier et pense que les enfants ont très tôt le droit, si ce n’est le besoin, d’être confrontés à l’Art avec son grand A.
On peut trouver formidable que cette collection (le premier titre, Picasso Imagier, est paru en 2020) favorise une initiation à l’art. S’agissant d’un type de livre conçu pour favoriser une reconnaissance des images, s’adressant aux très jeunes enfants, voire aux bébés, on peut trouver tout aussi remarquable de choisir des images émanant d’une démarche artistique, l’impressionnisme, qui entendait rompre avec la représentation académique du réel.
Car les images qui sont reproduites ici, détails de tableaux, montrent tout aussi bien, si ce n’est mieux, un langage plastique que la traduction visuelle d’un mot : traces grises du pinceau sur des nuages d’un blanc de zinc, gestes rapides roses, oranges et jaunes esquissant une grenade, lignes courbes d’un chapeau de paille…
© L'école des loisirs, 2022
Alors que la plupart des albums pour les tout-petits s’attachent à proposer des images nettes, cernées, contrastées (y compris dans la collection dirigée par Grégoire Solotareff, Loulou & Cie), la peinture de Renoir est une évanescence chromatique qui échappe à toutes les règles du genre.
Pour les petits, comme pour les très grands – y compris fin connaisseurs du peintre – cet imagier-là est donc avant tout un plaisir pictural sans réserve, un jeu de découverte et de redécouverte à partir du détail et, plus que tout sans doute, une invitation paisible à la contemplation d’une douceur de peindre la vie.