couv_visite.jpg Junko Nakamura, La Visite, éditions MeMo, 20/10/2016, 15 €

La Visite est le cinquième album de la créatrice d'origine japonaise installée en France et comme chacun des précédents, ce livre conjugue admirablement virtuosité, grâce et poésie. Ici, il s'agit d'un récit sans aucun texte, dont le seul titre invite à considérer tout particulièrement son épisode central, lors duquel une chatte blanche rend visite à un chat noir, dans une parenthèse surnaturelle qui comblera les enfants et leurs croyances animistes.

double1_visite.jpg © MeMo, 2016 (photographies Junko Nakamura)

Nous sommes avant Noël – comme Beatrice Alemagna fut en son temps Après Noël (Autrement, 2001) – les lumières, celles des guirlandes, celles des vitrines ou des intérieurs bien chauffés y tiennent le rôle premier, quand les ombres en sont leur pendant intriguant, offrant profondeur et mystère à ces images sereines. Les couleurs habitent pleinement le livre grâce à la technique de l'impression en tons directs, par laquelle les couleurs pures voisinent ou se superposent les unes aux autres... Le sens du mouvement, du langage cinématographique, l'enchaînement des points de vues et, surtout, l'exceptionnel rendu d'une atmosphère quasi palpable invite à manipuler l'ouvrage, à tourner ses pages sans chronologie, à laisser sourdre une sonate jouée au piano par une discrète voisine, ou accueillir la fraiche caresse de flocons de neige fugacement apparus derrière une vitre pour buter enfin sur l'impossible désir de pénétrer littéralement ces pages.

double2_visite.jpg © MeMo, 2016 (photographies Junko Nakamura)

Quand il pleut (2014) évoquait déjà L'Orage d'Anne Brouillard. La Visite, avec sa circularité humains / chats autour de la maison ramène encore vers ce chef d'œuvre de l'album sans texte publié en 1998 par les éditions Grandir, assurant une prolongation magnifique de l'art de l'album, entre rêverie suggestive et puissance narrative.