Il y a ceux qui, pour célébrer une nouvelle décennie, organisent d’extravagantes fêtes mondaines.

Et il y a ceux qui plantent des arbres.

Pour leurs 20 ans d’existence, les éditions jeunesse du Rouergue ont ainsi décidé de revenir à l’origine première de la matière première de leur production et de centrer leurs festivités sur des projets de création dans lesquels l’arbre est tout autant point de départ que d’arrivée. Il est vrai que l’arbre est à ce point chargé de sens et de symboles qu’il offre un développement tant réflexif que créatif quasi infini.

Dans ce contexte, il est aussi le lieu de convergences.

Celle d’abord, d’une saison (le printemps), d’un anniversaire (20 printemps) et d’un projet : Forêt-Wood, lequel commence, comme il se doit, par un livre.

 

couv-foret-wood.jpg Olivier Douzou, José Parrondo, Forêt-Wood, Rouergue, 2012, 17 €

 

Celui qui paraît ce jour, et réunit Olivier Douzou et José Parrondo. Ce dernier comme en rebond direct de Où ? dont il ramène des troncs à foison, du bûcheronnage et du sautage d’idée en idée pour atterrir dans cette heureuse convergence d’arbres dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils sont pluriels.

En fait, ils sont trois : le dessin de l’arbre, son nom dérivé du latin, sa légende (ou nom générique).

Parfois la légende seule éclaire le dessin. Parfois, et c’est là le plus amusant, le nom latinisé donne la clé, comme ce dessin d’une frondaison légendée « arbre sans tronc » et intitulée « yannarthus bertrandus ». Ailleurs, la grâce d’un trait – Olivier Douzou ne lassera pas de nous étonner – un trait velouté, filé, aérien, délicatement coloré, pourrait suffire à émouvoir quand la confrontation des légendes bouleverse tout à fait : «pater glucosus arbre à papa».

 

arbre-papa.jpg

pater glucosus arbre à papa

© Olivier Douzou

 

Grâce à ce fonctionnement ternaire, le lecteur découvre plus qu’un jeu de dictionnaire ; il rebondit à son tour entre nom, légende et dessin, fait la culbute, s’arrête net, fait un pas de côté, reconsidère, interroge (mais qui est Jean-Michel ?!) et, de page en page, en passant par ce réflexif "gommier / hâchurier", comprend enfin qu’il n’est question que de création dans cette démonstration profonde et généreuse.

Il y a de l’énergie, il y a du rire, de l’humour potache, du métafictif même, de la gravité, de la douceur, de la sensibilité et de la poésie ; il y a un foisonnement créatif, un espoir, une confiance.

Sur l’autre « Forêt-Wood », celui sur écran, la convergence est déjà féconde, ouvrant de nouvelles portes, et offrant de nouveaux rebonds, comme ce « Peu plié » de Michel Galvin, écho admirable au livre.

De la convergence à la transcendance entre livres, médias et auteurs… Quoi de plus prometteur en ce printemps ?