Adrien albert, Simon sur les rails, L'École des loisirs, 2012, EAN 9782211211345, 12,70 €
Discrètement, patiemment devine-t-on, l'auteur-illustrateur Adrien Albert construit une œuvre en contre-point des tendances : l'image privilégie la ligne claire, les teintes sont sourdes et le texte n'évite pas la redondance. Point d'effets spectaculaire ni d'humour ravageur. Non, de la simplicité, de l'évidence. Et de la justesse. Autrement dit, le plus difficile à atteindre en littérature pour la jeunesse.
Ce n'est pas par la densité ou la multiplication de détails qu'Adrien Albert retient le lecteur en ces pages qui le marqueront longtemps. C'est par le blanc, le vide, le neutre ou l'ellipse. En témoigne Simon sur les rails, l'histoire de ce jeune lapin qui vient d'entrer à l'usine et, pressé de rejoindre son grand frère après sa journée de travail, n'attend pas le train du matin mais part "à pied" pour le rejoindre, ce qu'il parvient à faire quelques secondes avant l'arrivée dudit train après un périple nocturne éreintant. Pour ces quelques secondes, le jeune lapin aura trotté toute la nuit, aura escaladé des montagnes, aura eu peur, se sera abimé les pattes. Parce l'esprit d'aventure est trop fort, l'attente impossible, parce qu'il y a un grand-frère à impressionner, à rejoindre au plus vite, ou parce que les voyages forment la jeunesse.
Adrien Albert, Simon sur les rails © L'École des loisirs, 2012 (Source image Le Point.fr)
De ces images lisibles à l'extrême, collées à un texte qui semble les commenter, sourdent magiquement mille interrogations (pourquoi ces lapins au milieu des humains, pourquoi travaille-t-il si jeune ?), mille émotions (celles générées par l'image, la seule à fond perdu, de Simon admirant la lune, ou par le décalage entre son entrée dans la vie adulte et ses attitudes enfantines...).
Les jeunes lecteurs ressortent de cette lecture nourris, confortés en même temps que doucement ébranlés, sans aucun doute heureux d'avoir été confrontés à un univers d'auteur si singulier, lequel chemine en eux, en nous, puissamment et durablement.
Commentaires
à voir, chez Clarabel, un billet sur cet album ainsi que de nombreux billets consacrés à Adrien Albert.
SVdLC'est en effet un très bel album coloré, mais pas chargé et surtout empreint de volonté et d'amour filial... Une belle découverte en somme.
Céline DavidIl faisait partie des albums proposés pour Premières pages. je me suis battue comme une lionne pour qu'il soit choisi, en vain... Ça vous rappellera sûrement des souvenirs ;-) J'adore l'univers de cet auteur, sa façon de s'adresser aux enfants. Après les romans initiatiques, voilà les albums initiatiques !
LauOui ;-) J'ai eu d'autres retours de cette sélection et décidément, ce fut une fosse aux lions ! Mais j'ai compris que beaucoup de projets de qualité étaient proposés cette année, c'est une bonne nouvelle. Quant à Adrien Albert, il mériterait en effet qu'on parle davantage de ses livres, c'est un très grand de la nouvelle génération d'auteurs-illustrateurs. Merci de votre commentaire et à bientôt,
SVdL
SVdLOh que oui ! Nous avions craqué, l'an passé, pour son "Cousa", sélectionné par notre comité de lecture (http://www.calameo.com/read/0003569...), déjà séduites par la force initiatique de cette histoire... Hein Lau ? ;-)... Nous récidiverons avec Simon, c'est sûr !
Cél